GERARDO CARBALLO: ORATEUR IN SOCIETÉ DE LÉGISLATION COMPARÉE SUR LA NOTION DE MÉDIATION ADMINISTRATIVE. PARIS 5 JUNIO 2023

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TEXTO DE LA CONFERENCIA“La notion de médiation administrative » RHITA BOUSTA

Comparaison entre les systèmes français et espagnol

 

 

Bonjour, je suis très honoré d'avoir été invité par la Société de Législation Comparée à réfléchir sur le livre de Rhita Bousta "La notion de médiation administrative" et à analyser les similitudes et les différences des modèles de médiation administrative pratiqués en France et en Espagne. 

 

Je remercie M. Didier Le Prado pour son aimable accueil en tant que président de la section du droit de l'action publique, ainsi que tous les intervenants et personnes qui assistent à ce débat.

 

·      Avant d'aborder le livre de la maitresse de conferences Rhita Bousta , je dois dire que mes premiers pas en matière de médiation administrative ont été faits il y a de nombreuses années sous l'impulsion du Médiateur de la République française, ainsi que de l'ouvrage bien connu publié par le Conseil d, État français de  Mille neuf cent quatre-vingt-treize "Régler autrement les conflits: Conciliation, transaction et arbitrage en matiére administrative”.

 

·      Ces références ont eu une influence décisive en France , sur le cadre du conflit juridique public; marquant , a mon avis, un tournant dans la manière d'appréhender les relations entre les citoyens-administrés et les administrations publiques, introduisant une nouvelle méthode dans l'action publique.

 

Deux règles essentielles de la médiation administrative découlent de cette expérience en Espagne: 1) la règle de l'équité comme élément nécessaire pour tempérer la rigueur de la loi écrite et 2) la règle de l'opportunité et l,interpretation operationelle  de la loi  pour chercher des solutions imaginatives et créatives de bonne administration pour nous éloigner de ce que la doctrine française a appelé le légalisme administratif.

 

Alors, le livre de Rhita Bousta, met l'accent sur l'ouverture des contours de la médiation administrative afin d'éviter une sectorisation de la médiation et de développer son intégration dans la véritable substance de cette figure juridique. L'auteure aussi souligne que le terme "notion" utilisé est plus approprié que le terme "concept" , et je suis tout a fait d, accord, parce que, le terme “notion”  est ouvert, diversifié, intégratif et flexible, pouvant évoluer avec l'acquisition de nouvelles informations ou expériences.

 

Cet ouvrage explore les éléments constitutifs du concept de médiation administrative, en se concentrant sur la médiation dans le contexte juridictionnel français et en le comparant à la situation espagnole par le biais d'enquêtes menées auprès d'experts français et espagnols.

 

 L'auteur souligne aussi qu'en Espagne, il n'existe pas de loi procédurale pour la médiation administrative ; par conséquent, je suis d'accord avec Rhita pour dire que,  en tant que les protocoles établis en Espagne sur la médiation judiciaire ne sont pas étendus à l'ensemble du territoire espagnol, une situation d'inégalité est creé pour les parties au litige qui ne peuvent pas acceder à la mediation, ce qui est incompatible avec le principe d'égalité et d'accès à la justice.

 

Rhita souligne également que le système de médiation judiciaire en Espagne est plus formalisé que celui de la France, avec des accords de médiation prenant une forme contractuelle en Espagne. En revanche, en France, l'acte final de médiation n'est pas rédigé necessariement, mais est plutôt matérialisé par une action de l'administration publique.

 

L'auteure aborde également la distinction entre la médiation et la conciliation et elle reconnaît que dans certains cas, les frontières entre les deux notions peuvent être floues, ce qui rend difficile leur distinction dans la pratique.

 

Rhita rejette l'idée que la médiation est une alternative au contentieux, et soutient plutôt que la médiation et le contentieux administratif sont complémentaires. Elle met en évidence l'importance de l'homologation judiciaire d'un accord extrajudiciaire, ce qui renforce l'autorité de la médiation, et souligne que les critères d'homologation en Espagne et en France sont similaires et conformes aux règles générales du consentement contractuel.

 

En ce qui concerne les principes accompagnant la médiation administrative, les éléments clés de la médiation administrative, selon Rhita, sont la compétence, l'indépendance, l'impartialité et la confidentialité. Cependant, Rhita fait remarquer que l'exigence de diligence, qui est liée à la compétence, n'est pas souvent mentionnée dans les textes espagnols, bien qu'elle soit importante pour assurer l'efficacité et l'immédiateté du processus de médiation.

 

En ce qui concerne les coûts de la médiation, je dois souligner que, la médiation administrative en Espagne n'est pas toujours gratuite. Les médiateurs peuvent être choisis par les parties et peuvent facturer des honoraires pour leurs services. Cela permet une certaine liberté dans le choix d'un médiateur, même s'il n'est pas affilié à une organisation officielle de médiation.

 

Quant à l'impact du principe d'indépendance dans la médiation institutionnelle, je dois prendre note que les seules institutions publiques en Espagne qui pratiquent la médiation administrative institutionnelle sont le Defenseur des droits espagnol et ses homologues dans certaines communautés autonomes. Ces institutions sont indépendantes et ne sont soumises à aucun mandat impératif.

 

La médiation institutionnelle se distingue par l'utilisation d'une méthode atypique, basée sur l'échange de documents écrits, l'évaluation du problème et l'expression d'une opinion par le médiateur institutionnel. Il n'y a pas de processus de négociation en navette, et la médiation institutionnelle est considérée en Espagne comme un rôle hybride entre un "arbitre intellectuel" et un "médiateur/conciliateur".

 

La co-médiation, c'est-à-dire la pratique de travailler en équipe de médiateurs dans un conflict, est courante en Espagne. Elle permet aux médiateurs d'échanger leurs impressions, d'apporter différentes perspectives et de collaborer pour trouver la meilleure façon de faciliter le dialogue entre les parties. 

 

En revanche, en France, la co-médiation n'est pas aussi courante, car le système de médiation fonctionne selon une logique plus verticale. Cependant, la décision d'utiliser la co-médiation dépendra du contexte spécifique du conflit et des préférences des parties impliquées.

 

Dans la seconde partie du livre, Rhita défend principalement l'exigence de liberté et d'égalité des parties impliquées dans la médiation, considérant qu'elle est inhérente à ce processus. Elle examine également les limites procédurales de la médiation, en analysant les circonstances dans lesquelles elle peut être rendue obligatoire ou volontaire.

 

Á mon avis, contraindre les parties à recourir à la médiation est une pratique invasive qui porte atteinte au principe de liberté. Cependant, si la médiation est volontairement proposé comme un choix parmi d'autres moyens de résolution des conflits sans exclure l'accès aux tribunaux, cela pourrait être envisagé. 

 

En France, bien que Rhita ne soit pas d'accord avec cette exigence, la médiation préalable obligatoire a été introduite dans la loi de 2016 sur la modernisation de la justice au XXIe siècle. Cette expérimentation concerne les secteurs de la fonction publique et des droits sociaux, et selon les données fournies, elle a entraîné une diminution des litiges contentieux.

 

En Espagne, la médiation n'est pas obligatoire. Il est possible qu'une administration ou une autre partie à la procédure refuse d'assister à la séance informative de la médiation sans contrevenir à la loi. Cependant, seulement en cas exceptionelles, l'absence injustifiée des parties à cette séance pourrait être considérée comme contraire à la bonne foi procédurale.

 

Même si la médiation  en France est qualifiée d'obligatoire, les parties ne sont pas contraintes de suivre le processus et peuvent le quitter à tout moment. Cela remet en question la véritable force contraignante de cette exigence, et cela crée un scénario où la nature obligatoire et volontaire coexistent simultanément, ce qui peut être considéré comme contradictoire et donc un oxymore.  

L'auteur souligne en tout cas que les procédures de médiation prealables ne constituent pas un obstacle décisif à la liberté des médiateurs. Environ la moitié des médiations préarrangées sont le résultat d'un choix délibéré de citoyen-administré, et l'administration n'est pas pénalisée si elle ne participe pas activement au processus de médiation. Par conséquent, il semble raisonnable de supprimer la clause de médiation obligatoire, comme il a étè suggéré  -selon Rhita- dans le rapport d'évaluation de l'Assemblée Nationale Française.

 

La présence d'une administration publique et les restrictions imposées par des tiers en dehors de la procédure de médiation peuvent également limiter la liberté des acteurs de la médiation. Les exigences d'autorisation pour que l'administration puisse conclure des accords, ainsi que les limites imposées par les lois espagnoles et françaises en matière de transaction, en sont des exemples. 

 

Il peut également être nécessaire d'avoir un médié représentant l'administration qui dispose des pleins pouvoirs pour signer des accords ou des engagements. 

 

D,autre part, la médiation administrative est délimitée en France par la loi de 2016, qui prévoit principalement les droits sur lesquels les parties n'ont pas le pouvoir d'agir et les matières de "compétence liée". En théorie, la médiation peut donc porter sur des questions de légalité susceptibles de faire l, objet d, un recours pour excés de pouvoir ou d,un référé, cela inclut des questions telles que la police administrative, le droit des étrangers, l'environnement, entre autres.

 

En Espagne, en l'absence d'une loi nationale sur la médiation, un bref article de la loi sur la juridiction contentieuse-administrative (art. 77)  fait référence au transaction et à la conciliation comme moyen de mettre fin à une procédure. De même, les protocoles et le guide de médiation du Conseil Général du Pouvoir Judiciaire de l, Espagne, sont utilisés comme référence. 

 

Ils excluent les questions relatives aux droits fondamentaux, au droit électoral, à l'ordre public et aux intérêts des tiers. Cependant, il existe une grande flexibilité dans l'inclusion des sujets de médiation, avec une liste ouverte qui inclut des domaines tels que la fixation du montant de l'indemnisation, les contrats publics, l'urbanisme, l'environnement, les activités insalubres, nocives, dangereuses et génératrices de nuisances, l'inactivité administrative, le silence administratif , les sanctions administratives et d, autres questions determinées para le juge lui-même.

 

La question de l'égalité des médiateurs est abordée sur la reconnaissance mutuelle pour éviter les déséquilibres entre les parties. Je pense que L'idée est de rechercher une situation d'horizontalité, où le médiateur joue un rôle essentiel en favorisant un dialogue transformateur. 

 

En ce qui concerne la notion de l'intérêt général, l'auteure est d'accord pour dire qu'un accord de médiation avec l'administration publique ne devrait pas compromettre ce príncipe, et  suivant cette idée, Rhita et moi nous considerons que l'objectif de la médiation est d'adopter une interprétation opérationnelle du droit et de rechercher la compatibilité des intérêts individuels avec l'intérêt général, contribuant ainsi à une meilleure qualité de la réponse qu'une administration publique devrait offrir.

 

Toutefois, il convient de noter que la médiation administrative -au moins en Espagne et je crois que en France aussi- ne peut avoir d'effets que pour un cas spécifique, puisqu'elle ne crée pas de jurisprudence et ne peut être appliquée comme un précédent pour d'autres situations juridiques similaires, sans porter atteinte au principe d'égalité.   

 

 Rhita parle aussi de la position de force qu'occupe l'administration dans la mediation par rapport à des citoyens-administrés qui sont dans une relation de sujétion particulière; et aussi , de la  motivation des décisions et des médiations pédagogiques  nécessaires pour que l'administration explique sa décision de manière claire.

 

En ce qui concerne le silence administratif, moi en tant que personne qui aime la musique vocale, garderai dans ma memoire la citation opportune de Rhita selon laquelle, “en musique, le silence a une durée déterminée”;  car bien que dans ce contexte artistique le silence fasse partie de l'interprétation, l'auteur reconnaît que dans le domaine des relations de l'administration avec des sujets privés, le silence peut causer des problèmes d'interprétation et de rupture dans les relations humaines.

 

En effect, le silence administratif est considéré comme l'un des éléments clés pour le développement de la médiation, et les médiateurs, en Espagne, sont des institutions appropriées dans ce context.

 

Rhita parle aussi de l,importance du “caucus”  -c,est à dire  une rencontré préalable individuelle avec les mediées- a fin que les parties puissent comprendre la position de l'autre et aborder la relation autrement que par une position de force; mais  elle souligne également que si un tiers favorise une partie au détriment de l'autre, cela peut dépasser les limites de la médiation. 

 

Selon l'auteure, la pratique permet de façonner le périmètre de la médiation administrative. Lorsque le médiateur soutient l'administré face à l'administration, il dépasse la neutralité. Cela se produit avec la double fonction du défenseur des droits en tant que médiateur et superviseur de l'activité de l'administration. Dans ce cas, selon Rhita, la fonction du Défenseur des droits n'est pas seulement de médiation, mais aussi de rétablissement de l'illégalité de l'administration. Elle conclut que les médiateurs institutionnels  ont un rôle de protection plutôt que de médiation. 

 

J'ai toujours défendu la médiation des Ombudsmen  dans tous les cas, car je ne veux pas qu'ils perdent le rôle original et de nature, dávoir être configurés en tant que médiateurs. Par conséquent, sans quitter le cercle de la médiation en tant que genre, j'ai défini la fonction de contrôle du défenseur du peuple espagnol comme une médiation en droit et une médiation en équite, car il ne s'agit pas seulement de l'exercice d'une fonction de contrôle au sens strict, mais plutôt d'une fonction visant à convaincre par la persuasión, en tant qu'il y a d'autres solutions possibles dans le cadre de la légalité adaptable aux besoins es aux intérêts de l, administration et le citoyen-administré.

 

“Je vais vous donner un exemple basé sur l'une des nombreuses expériences de médiation juridique que j'ai conduit au sein du bureau du Defenseur du peuple spagnol ou j,aie travaillé en tant que Conseiller,  pendant vingt ans.

Un citoyen spagnol, “luthier”et fabricant d'instruments de musique à cordes, s'est adressé à l'institution en faisant valoir que la police des frontières de l'aéroport de Barajas avait retenu son client étranger à Madrid, avec lequel il avait pris rendez-vous à Barcelone pour lui remettre l'instrument terminé.

Bien que la police des frontières ait refusé de laisser entrer le citoyen en Espagne parce qu'il ne respectait pas les règles d'entrée sur le territoire espagnol, le Defenseur , au lieu d'invoquer une infraction à la loi sur les étrangers, il a invoqué l'article 9 de la Constitution Espagnole, qui dispose que les pouvoirs publics sont tenus de faciliter la participation de tous les citoyens à la vie économique, et que ce citoyen était privé de l'exercice d'une activité économique et que ses droits étaient violés parce qu'il ne pouvait pas livrer le théorbe ni recevoir l'argent de la vente.

Une activité de médiation avec la police visant à la persuader que les intérêts publics et privés devaient être mis en balance et que cette action portait atteinte aux intérêts d'un citoyen espagnol, a permis de comprendre le vraie problème qui se posait; ce qui a facilité l'autorisation d'entrée en Espagne du citoyen étranger, en partant du principe qu'il devait retourner dans son pays après la conclusion de la vente. 

C'est la preuve, a mon avis, que les ombudsmen sont incontestablement des institutions de médiation en toutes circonstances, alors qu'il existe déjà sur nos continents plus de cinquante médiateurs parlementaires qui, comme le Défenseur des droits français et le “Defensor del Pueblo en Andalucía” utilisent déjà des systèmes de médiation ADR plus structurés, selon une étude comparative que j'ai récemment réalisée sur plus de 150 États qui disposent d'un tel bureau.  “

 

Pour terminer,  je félicite Rhita Bousta pour son magnifique ouvrage sur la notion de la médiation administrative et je vous remercie -Rhita- d'avoir donné une visibilité à la médiation administrative espagnole en dehors de nos frontières.